GRÈCE ANTIQUE - Une civilisation de la parole politique

GRÈCE ANTIQUE - Une civilisation de la parole politique
GRÈCE ANTIQUE - Une civilisation de la parole politique

L’histoire de la civilisation échappe difficilement à un double danger: une première conception en fait une sorte d’annexe qui comprendrait à la fois l’art, le costume, les coutumes funéraires, la cuisine, en un mot tout ce qui ne relève ni de l’histoire politique, ni de l’histoire économique et sociale, ni de l’histoire des idées; une seconde, découlant d’une tentation inverse, postule que tous les faits religieux, artistiques, sociaux, économiques, mentaux qui se situent à une même époque dans un même groupe humain «ont entre eux assez de liens essentiels pour constituer un ensemble doué d’une unité et d’une structure propres plus ou moins assimilables à celles d’un organisme» (H. I. Marrou).

Variante de l’illusion organiciste, une autre tentation, à laquelle les historiens de la Grèce ont souvent succombé, consiste à traiter une civilisation comme une essence immuable. Elle conduit à raisonner comme si les groupes «indo-européens» arrivés vers 2200-2100 avant J.-C. dans la péninsule qui allait devenir l’Hellade, et parlant un dialecte qui est l’ancêtre du grec de l’époque classique et du grec moderne, possédaient déjà, en germe, les qualités qui allaient permettre l’existence d’Homère ou d’ Aristote. À ce titre, il n’y a aucune raison de ne pas prolonger l’étude de la civilisation grecque jusqu’à nos jours: des tablettes mycéniennes à l’œuvre de Nikos Kazantzakis la continuité linguistique est totale; d’une génération à l’autre, on n’a jamais cessé de se comprendre.

La «civilisation grecque» dont on traite ici correspond à la naissance, au développement, à la maturité et à la crise de la cité, c’est-à-dire à la période comprise entre la fin du monde mycénien et les débuts de monde hellénistique. De 1500 à 1200 avant J.-C., la civilisation du «bronze récent», «mycénienne», avait progressivement unifié ce qui allait devenir le monde grec, jusque-là séparé en trois aires culturelles distinctes, celle de la Crète, celle des Cyclades, celle de la Grèce propre; elle avait répandu un même matériel céramique sur une large partie du bassin méditerranéen, de l’Asie Mineure à l’Italie du Sud, connu des dieux qui allaient devenir ceux du monde grec, écrit pour la première fois dans une écriture syllabique, la langue grecque. La chute du monde mycénien amorcée par des mouvements de peuples vers 1200 avant J.-C., se prolonge tout au long du XIIe siècle, pendant que le fer remplace le bronze; l’«invasion dorienne» qu’on a longtemps confondue avec cette catastrophe achève, au XIe siècle sans doute, la mise en place du peuplement, mais il n’en existe pas de traces archéologiques. Il ne s’agit pas seulement de la disparition d’un système économique et social, centré sur le palais et son organisation bureaucratique – le palais dont les magasins concentrent le surplus du travail paysan. Les conquêtes d’Alexandre marquent une autre coupure, elle aussi économique et sociale. Non seulement ce sont des régimes monarchiques qui contrôlent désormais – malgré le maintien de la cité – l’activité de la majeure partie des Grecs, non seulement une même éducation (paidéia ) distingue, de l’Inde à l’Espagne, les Grecs des Barbares, mais surtout la masse du travail, et d’abord du travail agricole, dont vivent les Grecs est maintenant fournie par les peuples asservis de l’Orient. Alexandrie n’est pas officiellement en Égypte, mais Alexandrie ne saurait exister sans le labeur des fellahin égyptiens.

1. Les renouvellements

Chronologiquement, la «civilisation grecque» proprement dite se situe approximativement entre l’apparition du style «protogéométrique» au milieu du XIe siècle et les conquêtes d’Alexandre (mort en 323 av. J.-C.), même si la mutation de la période «grecque» à la période «hellénistique» s’est poursuivie tout au long du IVe siècle avant J.-C. et se prolonge encore au-delà. Une des caractéristiques majeures de la civilisation grecque est la prodigieuse rapidité de son évolution qui contraste avec la relative stabilité des formes économiques et sociales des empires voisins. Les plus lucides en ont été conscients: «Le monde grec ancien vivait de façon analogue au monde barbare actuel», dira Thucydide dans son Histoire de la guerre du Péloponnèse (I, 6.). On a coutume de distinguer trois grandes étapes: les «siècles obscurs», qui séparent la chute du monde mycénien (à partir de 1200 av. J.-C.) de la fin du IXe siècle, l’époque archaïque (800 env.-500 env.), enfin le classicisme, triomphant au Ve siècle, en crise au IVe siècle.

Les siècles obscurs

Archéologiquement, les vraies innovations se produisent dans le courant du XIe siècle avec le remplacement de l’inhumation par la crémation, du bronze par le fer. Cette civilisation reste mal connue. Mis en forme au début de l’époque archaïque, les poèmes homériques, tournés vers le passé mycénien, décrivent une société centrée sur le manoir (oikos ) princier ou seigneurial et évoquent vraisemblablement les siècles obscurs. Toutefois, ces poèmes mettent également en scène des groupes de guerriers, dépendant certes du roi, mais formant une communauté qui s’exprime au besoin à l’«assemblée». En outre, les villages paysans attestés dès l’époque mycénienne ont, dans une large mesure, subsisté, comme le montrent les données de l’archéologie. Comment s’est faite pour eux la transition entre la souveraineté du palais et celle du manoir aristocratique, comment se sont rassemblés le dèmos du bourg, le laos guerrier et l’oikos des rois et des princes? La seule chose certaine est que la société grecque la plus ancienne est déjà une société conflictuelle, que l’agôn , la rivalité qui s’exprime dans les concours athlétiques aussi bien que dans la guerre, marque déjà la civilisation grecque, que l’idée de souveraineté absolue disparaît et que Zeus lui-même n’est pas un despote oriental. Quand s’ouvre l’âge archaïque, la monarchie a été presque partout remplacée par des aristocraties, et l’entreprise coloniale, à partir du milieu du VIIIe siècle, suppose qu’un minimum de pouvoir collectif a été établi dans ce qu’on peut désormais appeler des cités.

L’époque archaïque

Deux mots peuvent caractériser la civilisation de la Grèce archaïque: nomos , traduit imparfaitement par «loi», et agôn , le combat, la rivalité, le procès; ces deux concepts étant solidaires, la «loi», et notamment la législation écrite qui fait son apparition au VIIe siècle (Zaleucos à Locres, en Italie du Sud, avant 650? Dracon à Athènes en 624), fournit un cadre aux conflits sociaux qui déchirent les cités. L’agôn est à la fois interne à la cité et extérieur, sous la forme de la guerre; celle-ci a d’abord des aspects rituels et sert d’épreuves aux groupes de jeunes gens qui s’affrontent en champ clos pour un territoire déterminé: ainsi la Triphylie entre Sparte et Argos, la plaine Lélantine en Eubée entre Chalcis et Érétrie; mais, en d’autres circonstances, elle engage le destin de toute une communauté: la Messénie est soumise par Sparte au cours de deux guerres au VIIIe et au VIIe siècle, ses habitants deviennent des hilotes qui ne renonceront du reste jamais à leur antique indépendance. La cavalerie conserve assez de prestige pour que, au Ve siècle encore, les nobles Eubéens s’appellent les hippobotai , les éleveurs de chevaux, mais c’est l’infanterie lourde des hoplites qui, au début du VIIe siècle, devient la reine des batailles. Nul doute que les hoplites, recrutés pour une part au moins parmi les paysans aisés, n’aient joué un rôle déterminant dans l’élargissement du cadre civique et dans le développement d’un idéal égalitaire. Mais l’agôn revêt aussi des formes pacifiques. La date la plus ancienne de l’histoire grecque proprement dite est en effet celle de l’institution des concours olympiques (776 av. J.-C.). À Olympie, à Delphes, sur l’isthme de Corinthe, à Némée, des concours périodiques d’abord régionaux, puis «panhélléniques» voient s’affronter, dans une nudité qui aux yeux des Grecs contribue à les séparer des barbares, les jeunes hommes des différentes cités. Le premier vainqueur de la course à pied à Olympie est un personnage assez important pour qu’après sa mort son corps serve à délimiter la frontière de deux cités (Pausanias, Description de la Grèce , V, VIII, 6). En Crète, à l’époque hellénistique, un homme fait s’appellera encore un coureur (dromeus ).

L’art participe de ce mouvement de la Grèce archaïque, d’abord par la succession rapide des styles et des époques: ainsi, dans le domaine littéraire, la poésie épique disparaît après le VIIe siècle tandis que le lyrisme exprime à la fois les tourments de l’individu et les conflits internes des cités (poèmes «séditieux» d’Alcée à Lesbos); en céramique se succèdent les périodes «géométrique» (IXe-VIIIe siècle), orientalisante (VIIe siècle), archaïque proprement dite (VIe siècle) avec une mutation décisive comme l’inversion des couleurs qui se produit à Athènes vers 530 (apparition des figures rouges sur fond noir). À ce titre la Grèce archaïque possède la première civilisation historique. Autour des sanctuaires, la sculpture et l’architecture expriment elles aussi à la fois l’esprit de rivalité qui règne entre les cités et à l’intérieur des cités elles-mêmes, ainsi que la souveraineté des divinités poliades et l’esprit de concurrence des donateurs. Enfin, le Panthéon est réorganisé, selon le double principe de l’agôn et du nomos . Si, dans les poèmes hésiodiques, Zeus est le souverain qui, aux termes d’une longue et sanglante histoire, impose le règne de la justice (dikè ), ce triomphe n’empêche pas l’assemblée des dieux d’exprimer toutes les tensions de la société. L’opposition entre Apollon et Dionysos, entre le dieu de la régulation sociale par excellence et la divinité qui symbolise l’irruption de la nature sauvage au milieu de la société, n’est qu’un cas parmi beaucoup d’autres. La cité crée au besoin ses propres catégories religieuses dont la plus caractéristique est peut-être celle du mort héroïsé qui est aussi bien le gardien de frontière (Œdipe à Thèbes et à Athènes) que celui de l’unité civique (Thésée) ou encore celui des institutions politiques (héros clisthéniens des tribus et des dèmes à la fin du VIe siècle athénien).

Les temps classiques

Athènes et la Grèce

À la fin du VIe siècle, les traits de la Grèce des cités sont fixés pour longtemps et les guerres médiques sont l’affrontement du monde des citoyens et de celui des sujets. Entre les cités, même si les dominations changent, les frontières ne bougent guère, sauf en Sicile où Syracuse annexera une grande partie de l’île et dans le Péloponnèse où, au IVe siècle, la Messénie recouvre son indépendance. En un sens, la civilisation grecque classique offre les mêmes caractères qu’à la période archaïque, en particulier la puissance de renouvellement: les écoles philosophiques, de Milet à l’Italie, se répondent les unes aux autres; au Parthénon, sur une période de quinze ans (de 447 à 432 av. J.-C.), on peut suivre, des métopes aux frontons et à la frise, la transition qui mène d’un art encore considéré comme archaïque à la totale discipline classique. La tragédie est le fait du Ve siècle athénien (les premières représentations auraient eu lieu en 532) et de lui seul. Après la mort de Sophocle, en 406, il n’y aura plus aucun grand tragique. Euripide, plus jeune de quinze ans, mais qui meurt plus tôt, en est déjà au stade de la réflexion d’un tragique sur la tragédie. «Ce que montre la tragédie, c’est une dikè en lutte contre une autre dikè , un droit n’est pas encore fixé, qui se déplace et se transforme en sens contraire» (J.-P. Vernant). Au IVe siècle, le développement de l’esprit juridique, la fixation des catégories du droit rendent la tragédie inutile. Toutes les écoles philosophiques qui, dans certains cas, se prolongent jusqu’à l’époque byzantine naissent au IVe siècle athénien.

Cette prééminence d’Athènes est loin de suivre le même rythme sur tous les plans et ce fait est un obstacle décisif à toute représentation totalitaire de la civilisation grecque. Vers 525 avant J.-C., la céramique d’art athénienne atteint une supériorité qui lui cause un quasi-monopole: pratiquement, à la fin du VIe siècle et au début du Ve siècle, les vases de luxe, que l’on retrouve dans toute la Méditerranée, sont d’origine athénienne. Le déclin commence au milieu du Ve siècle; il est si rapide que, au IVe siècle, la production athénienne ne comptera guère en face de la masse des vases italiotes. Au contraire, c’est en ce même milieu du Ve siècle que s’affirme la prépondérance d’Athènes dans le domaine de la sculpture. En 477 avant J.-C., l’Aurige de Delphes est peut-être l’œuvre de Pythagoras de Rhégion, mais, après Myron, Phidias et son école attireront les sculpteurs à Athènes, y compris même le Péloponnésien Polyclès. Cette supériorité ne sera guère mise en question avant 420 avant J.-C. et le renouveau des écoles d’Ionie et du Péloponnèse; mais, même alors et pendant le IVe siècle, compte tenu des variations locales, la sculpture parle un langage commun inventé à Athènes.

Mouvement intellectuel et artistique et cadre politique

Les liens qui unissent ce mouvement intellectuel et artistique au cadre politique demandent à être précisés. Dans la tragédie et la comédie les liaisons sont évidentes. Le chœur comique se tourne vers la cité et lui parle. Le final de L’Orestie d’Eschyle (458) situe les institutions d’Athènes entre l’«anarchie» et le «despotisme», préservant la peur au beau milieu des techniques de la délibération: le héros de Sophocle affronte la collectivité en solitaire et celui d’Euripide s’interroge face au public. Au IVe siècle, il n’en sera plus tout à fait de même; la comédie «moyenne», puis «nouvelle», met en scène des types sociaux étrangers à la vie politique: le soldat, par exemple, est un mercenaire. Le lien entre l’art céramique et la vie politique a toujours été beaucoup plus relâché; souvent les peintres et les potiers d’Athènes ne sont pas Athéniens; les vases, à la grande époque de la fin du VIe siècle avant J.-C., offrent une image modernisée des légendes épiques (les combattants homériques y sont vêtus en hoplites, les amazonomachies reflètent assez fidèlement l’opposition avec le monde barbare), mais, dès le Ve siècle, les potiers évoluent vers un art de la distraction. La sculpture a été longtemps dominée par les commandes des cités-États et des sanctuaires «panhelléniques», seuls maîtres d’œuvre des temples et de leurs décors, extérieurs et intérieurs, ou des en-têtes des décrets.

Mais le triomphe du Ve siècle s’accompagne d’un élargissement du domaine de l’art grec. Avant et après les guerres médiques, il y eut un art gréco-perse. Ainsi, le «sarcophage de Satrape», à Sidon, à peu près contemporain du Parthénon, retrace la vie d’un magnat de l’Empire. On peut suivre les commandes de ces hauts personnages jusqu’au milieu du IVe siècle avant J.-C. Scopas, le plus grand sculpteur – avec Praxitèle – des années 360-330, collabora à la fois à la décoration du temple de Tégée en Arcadie, œuvre civique, et à celle du Mausolée, tombeau gigantesque de Mausole, satrape de Carie († 333 av. J.-C.). Praxitèle sculpte pour le temple d’Aphrodite à Cnide une statue célèbre qui serait inspirée par une courtisane athénienne. À l’intérieur des cités, les citoyens, qui tendent à devenir au IVe siècle de simples particuliers, passent commande de pierres funéraires. Longtemps l’idéal civique s’y exprime et la sévérité parthénonienne se retrouve jusqu’au début du IVe siècle même dans les stèles représentant des femmes, mais, peu à peu, le monde privé fait irruption dans l’art. Les sentiments familiaux s’expriment: amour conjugal, amour des enfants, avec une vivacité qui eût choqué les générations précédentes. Même l’art monétaire, pourtant par définition contrôlé par la collectivité, n’échappe pas à cette évolution. Certains des grands artistes qui, à la fin du Ve siècle, frappent les monnaies de Syracuse, signent leurs œuvres; le monnayage athénien du Ve et du IVe siècle répète avec des variantes infinies les types qui avaient répandu dans tout l’Orient l’argent du Laurion.

Urbanisme et philosophie

Aucun art n’apparaît, au premier abord, mieux exprimer la civilisation de la polis que celui qui s’attache à composer l’espace urbain. Si l’on veut trouver une expression quasi pure de l’urbanisme civique, il faut remonter très haut dans le temps, et de préférence hors de la vieille Grèce, dans le monde colonial. Ainsi, à Mégara Hyblaia, en Sicile, les fondateurs du VIIIe siècle ont laissé au centre de la ville l’espace (agora ) qui n’allait recevoir son organisation que des générations ultérieures. Le fameux «géométrisme» de l’école d’Hippodamos de Milet, philosophe qui fit partie de l’entourage de Périclès, architecte du Pirée, lui est en réalité très antérieur. «Le plan régulier qui délimite des parcelles identiques, que jalonnent des bornes ou des murs, est lié à toute installation communautaire sur un territoire distribué aux occupants en parties égales» (R. Martin). La division en grandes zones exprimant les fonctions économiques, résidentielles, religieuses et politiques de la cité, division qui se retrouvera plus ou moins dans toutes les villes de l’époque hellénistique, contredit en un sens l’idéal civique: il y a bien une fonction artisanale et commerciale de la cité et, par conséquent, des quartiers de potiers, des ports, des marchés, mais la répartition des habitants à l’intérieur d’une ville ne correspond pas à leur fonction politique; les différentes catégories d’habitants (esclaves, métèques et citoyens à Athènes) ne se voient pas attribuer de quartiers séparés. Contrairement à ce qui se passe dans certaines cités oligarchiques, l’agora d’Athènes est ouverte à tous, mais, naturellement, esclaves et métèques sont exclus des lieux où l’on délibère.

La philosophie exprime au plus haut degré les contradictions d’une civilisation où la cité, forme dominante, est cependant à tout moment mise en question. Dès ses origines, au VIe siècle ionien, elle oscille entre le discours public et le langage de la secte initiatique, laquelle prit en Italie la forme d’une petite cité à l’intérieur de la grande. Empédocle se présente au peuple d’Agrigente, «la tête ceinte de bandelettes couronnées de fleurs». Le monde qu’il décrit, dans le langage de l’épopée, est simultanément celui de l’amour et de la haine, de l’égalité et du partage, de la diversité et de l’unité, toutes notions civiques. Au Ve siècle athénien, les sophistes préparent à l’argumentation les orateurs de la démocratie dont Protagoras d’Abdère est un des rares théoriciens connus de nous, mais la seconde génération, celle qui commence à enseigner pendant la guerre du Péloponnèse, et dont Socrate fut à la fois le représentant et l’adversaire, met en question le principe suivant lequel la moralité civique s’identifie à la moralité tout court. Au IVe siècle, avec Platon, l’homme lui-même est une cité où s’affrontent les forces antagonistes; cependant, la cité ne trouve plus son modèle en elle-même, mais dans l’ordre de l’univers. Les tensions qui, à la fin du IVe siècle, opposeront les Citoyens du monde stoïcien aux hommes privés par excellence que sont les épicuriens ont été préparées par l’évolution du monde grec après la guerre du Péloponnèse (431-404 av. J.-C.).

Variations spatiales

Rien ne serait plus faux que d’imaginer une civilisation grecque homogène. Dans la Grèce propre elle-même, le phénomène de la cité – et les institutions politiques qui lui correspondent – ne s’est pas manifesté partout. «Une grande partie de la Grèce vit à la manière ancienne», constate Thucydide au début de son récit (I, v, 3), faisant surtout allusion aux populations du Nord-Ouest, Étoliens et Acarnaniens, qui sont des «peuples» et non des cités et qui passeront directement à la forme fédérale de l’époque hellénistique.

Sur les marges du monde grec, ainsi en Macédoine, la royauté des siècles obscurs a subsisté; à Chypre, outre la royauté et l’existence d’un important peuplement phénicien, on note la présence, à l’époque géométrique, d’un rituel d’enterrement du guerrier avec son char et ses chevaux et la persistance jusqu’à l’époque hellénistique d’une écriture alphabétique qui remonte aux temps mycéniens. Cela n’empêchera pourtant pas l’art grec, sous ses formes les plus classiques, de se répandre à Chypre au Ve siècle, comme l’ont prouvé les récentes fouilles de Salamine.

Un autre facteur de différenciation tient au mode d’exploitation du sol; à Sparte, en Crète, en Thessalie, la terre est cultivée par des paysans dépendants grecs (hilotes, clarotes, pénestes) qui sont considérés, à Sparte, comme des représentants des couches pré-doriennes de la population et qui sont les «esclaves» de l’État. Ce système qui sera ébranlé surtout à partir du IVe siècle permet le maintien de castes militaires dont les membres sont seuls à jouir de l’«égalité». La plupart de ces collectivités sont rurales, mais il serait faux d’identifier absolument archaïsme et vie purement agricole. Marseille était encore, au IVe siècle, une des cités grecques les plus conservatrices, ayant à sa tête une caste de timouques seuls aptes à fournir les magistrats. La situation est différente dans les cités où s’introduit – essentiellement à partir du début du VIe siècle – l’esclavage d’hommes achetés à l’extérieur. L’esclavage permet alors la libération du paysan indigène, qui est un fait accompli avec les réformes de Solon (594 av. J.-C.). La «modernité» des Athéniens, leur extraordinaire esprit d’entreprise trouvent ainsi leur explication ou du moins leur point de départ. Les conflits du Ve siècle opposent entre eux ces deux mondes. L’archè (empire) athénienne, forte de ses trières, fait face à la symmachia (ligue) péloponnésienne qui l’emportera; mais ces groupements qui dépassent la cité ne la mettent pas véritablement en cause. Maîtresse de plusieurs centaines de cités, Athènes ne les annexe pas comme le fera Rome. Le monde de l’«empire» est toujours défini dans les textes officiels comme «au-delà des frontières». Les contacts avec le monde «barbare» constituent un facteur de différenciation peut-être plus important encore. Ces contacts prennent des formes extrêmement diverses. Une des plus répandues, au VIe siècle notamment, est l’entrée de mercenaires grecs, hoplites lourdement armés qui étaient alors les meilleurs soldats du monde méditerranéen, au service des souverains de l’Égypte, de la Mésopotamie, de la Perse. La technique militaire qu’ils propagent est née de la cité grecque, mais les groupes de mercenaires, même s’ils continuent à se réclamer de leurs origines, ne sont pas des citoyens. De même, l’art grec est introduit, en particulier à la cour de Suse, par d’autres exilés. Les marchands forment une troisième catégorie; dès 800 avant J.-C., on les rencontre à Al Mina à l’embouchure de l’Oronte; Emporion, en Espagne, est un port de commerce, un comptoir dont les habitants ne forment pas à l’époque classique une polis . Il en est peut-être de même d’un des plus célèbres habitats grecs de l’Italie du Sud, Siris. La cité de Naucratis, en Égypte, est distincte du centre commercial qui regroupe des Grecs venus de plusieurs cités. Là même où il s’agit bel et bien de cités, les établissements dont la vocation est avant tout commerciale, notamment ceux qui sont fondés par les Phocéens, se caractérisent par le faible développement de leur territoire rural (chôra ). Comparons par exemple Marseille (fondée vers 600 av. J.-C.) et Métaponte, colonie achéenne créée vers la même date sur un riche terroir de l’Italie méridionale. Le plus souvent, cependant, l’implantation des Grecs en terre étrangère prit la forme de la cité. Les colonies «répètent» les métropoles, mais cela ne va pas sans modifications profondes. L’existence d’un peuplement indigène sur les emplacements colonisés est quasi général et la colonisation ne fait pas disparaître ces établissements. Il est certain qu’à Syracuse et dans les villes de la mer Noire le travail agricole était, au moins en partie, effectué par des indigènes réduits en servitude. Ce fut là une première forme de contacts et d’hellénisation. Elle ne fut pas sans conséquence. La cité grecque était caractérisée par un habitat groupé; même dans une cité comme Athènes, il y avait des villages, on ne trouvait pas ou fort peu de fermes isolées. Dans certains établissements coloniaux, au contraire, un quadrillage délimite des lots de terre commandés par des fermes; ces dispositions s’expliquent peut-être par l’emploi d’une main-d’œuvre indigène. Par ailleurs, les colons n’avaient pas toujours, n’avaient peut-être pas souvent pu emmener de femmes grecques. Les indigènes y pourvurent de gré ou de force. Il ne s’ensuit pas qu’il se soit créé de véritables centres de civilisation mixtes. L’archéologie montre que les colons grecs ont un habitat, un matériel entièrement grecs. Des divinités indigènes furent sans aucun doute annexées, mais cela aussi était une tradition grecque. Les conséquences politiques furent beaucoup plus importantes. Un royaume comme celui du Bosphore, fondé vers 480 avant J.-C. autour de Panticapée (Kertch) en Crimée, comprend à la fois des cités grecques et des territoires indigènes. C’est déjà le monde hellénistique avec ses poleis et sa chôra indigène. On a pu dire (M. I. Finley) qu’en Sicile «l’idée même de cité-État avait fait faillite». La chute contre les indigènes, contre les Carthaginois, les monarchies militaires qui se constituèrent au VIe siècle et se reconstituèrent sous une forme nouvelle après l’«interlude démocratique» de 466-405 avant J.-C. aboutira au IVe siècle à la création de deux Siciles, l’une à l’ouest (les limites en varieront considérablement) étant une base carthaginoise, l’autre étant contrôlée par les souverains de Syracuse. Paradoxalement, cette cité qui n’en était plus une fut précisément choisie par Platon pour constituer l’État idéal. Au IVe siècle, le problème indigène semble faire place à un problème paysan. Ici encore, la civilisation hellénistique est en vue. Mais, fait remarquable, cette monarchie militaire sicilienne devait à son tour influencer la cité grecque en crise en lui transmettant les techniques nouvelles du siège que, par l’intermédiaire des Carthaginois, elle tenait peut-être de l’Orient.

Si forts qu’aient donc été les facteurs de différenciation, le monde grec n’en est pas moins un, à la veille des conquêtes d’Alexandre, autour de la Méditerranée «comme des grenouilles au bord d’une mare» (Platon). La preuve en sera donnée, à l’époque hellénistique, par l’adoption d’une langue et d’un style de vie communs. Mais, dès l’époque archaïque et classique, pour l’essentiel il en est déjà ainsi.

2. Le discours grec

Essayons maintenant d’analyser, à l’aide de sa propre langue, le discours que tient cette civilisation. Toute culture se définit par rapport à la nature, toute culture se sert d’une grille qui intègre et code les dieux, les hommes, les animaux et les choses. Cette grille est le plus souvent implicite et c’est le travail de l’ethnologue que de la décoder. Un des traits les plus caractéristiques de la civilisation grecque est au contraire de mettre à la disposition du chercheur les couples d’opposition qui, explicitement, ont été les siens. Le «cru» et le «cuit» ont été tout simplement le cru et le cuit. Il n’est pas besoin de les déduire.

L’homme grec

Culture et sauvagerie

Les textes les plus anciens de la littérature grecque, les poèmes homériques et hésiodiques donnent une définition anthropologique et normative, exclusive et inclusive de la condition humaine. L’homme est exclu des temps divins de l’âge d’or, il n’existe que par le travail agricole accompli au sein de la communauté familiale, l’oikos ; l’homme n’est pas non plus un cannibale: «Telle est la loi que le Cronide (Zeus) a prescrite aux hommes que les poissons, les fauves, les oiseaux ailés se dévorent, puisqu’il n’est point parmi eux de justice» (Hésiode, Travaux , 276-278). L’Odyssée tout entière propose une même définition. Les voyages d’Ulysse sont des voyages hors du pays des hommes, qu’il rencontre des dieux, des morts, des cannibales ou des mangeurs de dattes. L’homme, c’est bien entendu l’homme grec, ce «mangeur de pain».

Dans les relations avec les dieux, le lien et en même temps la séparation s’établissent au moyen du sacrifice, repas carné – l’animal sacrifié est d’abord le bœuf de labour – accompagné de libations de vins et de la destruction symbolique de grains. Les dieux reçoivent la fumée des os et d’une part de la graisse, ils hument les aromates; les hommes se partagent l’essentiel de la viande. L’homme grec est donc cultivateur, éleveur et cuisinier; mais toute la gamme qui sépare les deux extrêmes: culture et sauvagerie, se répétera dans le sacrifice et dans le panthéon lui-même. Les divinités de la nuit et du monde souterrain (ainsi les Euménides) reçoivent des produits «purs», libations «sans vin», miellées; les animaux qui leur sont sacrifiés sont brûlés intégralement. Les sectes qui refusent le sacrifice sanglant, tels les pythagoriciens, ne sacrifient que des produits végétaux «naturels» purs, lait, miel et aromates. Mais, inversement, le culte de Dionysos, dieu de la nature sauvage, culmine dans la manducation de la viande crue (omophagie). À l’autre extrémité de la chaîne, le sacrifice du bœuf, ce compagnon de l’homme, est à la limite un assassinat qui doit être puni. Dans la fête des Bouphonies, fête de Zeus Polieus à Athènes, les meurtriers du bœuf (le prêtre, le couteau) doivent être jugés. Comme l’omophagie dionysiaque peut, elle aussi, aboutir au meurtre (ainsi dans Les Bacchantes d’Euripide), on voit que tout sacrifice trouve sa limite extrême dans le sacrifice humain qui est retour à la sauvagerie, chute dans le monde «primitif», celui de l’inceste: les «cyniques» qui, à la fin du IVe siècle, recommanderont le retour à la nature, condamneront la consommation de viande cuite et préconiseront l’inceste et l’anthropophagie. Le contact avec la nature sauvage est vécu par les Grecs à l’occasion de la chasse. Les éleveurs et cultivateurs ne sont chasseurs que marginalement; une bête chassée ne peut être – sauf cas tout à fait exceptionnel – sacrifiée. Comme le montrent et les mythes et la tragédie, l’homme chasseur, au contact direct de la nature sauvage, a une double face: la chasse est le premier degré de la rupture avec le monde sauvage, les «héros culturels» des légendes grecques sont tous des chasseurs et des destructeurs de bêtes fauves, mais la chasse est aussi la part sauvage de l’homme; ainsi, dans les mythes, le sacrifice d’un animal chassé est le plus souvent le substitut d’un sacrifice humain.

Ces cadres archaïques seront utilisés tout au long de l’histoire grecque et s’intégreront, surtout à partir de la fin du VIe siècle, aux violents conflits politiques qui secouent la cité. Le thème de l’âge d’or, ce paradis végétarien, s’opposera au thème de la misère de l’homme sauvage. Les cités s’attribueront l’origine de la civilisation, ainsi Athènes utilisant les mystères d’Éleusis pour faire sienne «l’invention» de l’agriculture. Pendant un bref et grandiose moment, au Ve siècle, l’arrachement de l’humanité à la sauvagerie fut attribué à l’humanité elle-même (ainsi chez Démocrite). Mais cela ne dura pas.

Grecs et Barbares

La seconde opposition dérive pour une part de la première: le Barbare est simplement le non-Grec, c’est-à-dire celui qui ne sait pas parler grec, exactement comme l’Allemand est pour le Russe le «muet». Chez Homère, le mot ne désigne que les voisins cariens. Chez Hérodote, au Ve siècle, les relations sont plus subtiles: la Grèce est le pays des heureux mélanges et de la pauvreté, tandis que les merveilles se réfugient aux extrêmes, et d’abord l’or, présent aux quatre points cardinaux. La marche vers les extrêmes est aussi la marche vers le non-humain. Les Barbares peuvent se «déduire» des Grecs en ce sens que leurs coutumes sont à l’inverse; ainsi l’Égypte: «Les Égyptiens, qui vivent sous un climat singulier, au bord d’un fleuve offrant un caractère différent de celui des autres fleuves, ont adopté aussi presque en toutes choses des mœurs et des coutumes à l’inverse des autres hommes» (Hérodote, II, 35); au IVe siècle, l’historien Éphore (fragment 42) distinguera deux sortes de Scythes, anthropophages et végétariens, deux sortes opposées d’inhumanité. Antipodes, les Barbares sont aussi origines: pour Hérodote, nombre de dieux grecs viennent d’Égypte (II, 49-58) et les Cariens sont en partie responsables de l’armement hoplitique (I, 171), ce qui du reste semble faux. Ce niveau proprement mythique sera dépassé; Hérodote lui-même, au début de son récit, entend raconter «les grands et merveilleux exploits accomplis tant par les Grecs que par les Barbares». L’opposition Grec-Barbare, qui n’est pas raciale mais culturelle et sociale, celle des esclaves de la loi et des esclaves du despote, ne recouvre pas parfaitement l’opposition Europe-Asie, par exemple. La notion même d’hellénisme est d’ailleurs une conquête de la génération des guerres médiques. Avant d’être le vainqueur de Marathon, Miltiade avait été au service du Grand Roi, et le cas n’est pas isolé. Au IVe siècle, la notion d’hellénisme demeure culturelle: est grec celui qui a subi l’éducation hellénique, qu’un Barbare d’origine est apte à recevoir; mais cette notion se transforme peu à peu: pour Aristote, est barbare celui qui, par nature , est fait pour être esclave. Les schémas culturels qui fonctionneront à l’époque hellénistique sont en place.

Les contradictions internes de la cité

Maîtres et esclaves

Le couple maître-esclave, bien qu’il ne soit pas sans rapport avec les précédents, apparaît comme une création de la civilisation de la cité. Il y a bien des «esclaves» dans le monde homérique, mais les mots qui les désignent sont souvent les mêmes que ceux qui qualifient les serviteurs que nous dirions «libres». Au plus bas de l’échelle sociale, l’esclave se rencontre avec le thète, ouvrier agricole non rattaché à l’oikos . La notion d’esclave ne s’est précisée qu’au fur et à mesure que se précisait celle de citoyen, c’est-à-dire qu’elle n’est pas parfaitement claire avant le VIe siècle avant J.-C. Quand Solon rapatrie les Athéniens vendus en esclavage pour dettes, il distingue du même coup entre les Athéniens qui ne peuvent plus désormais être esclaves et les autres. L’esclave ne peut plus être qu’un étranger. À l’époque classique, l’esclave est partout; sa présence apparaît comme une donnée naturelle. Le langage confond, au Ve siècle, deux sortes d’esclaves, les esclaves achetés sur le marché (auprès des trafiquants barbares ou à la suite de la prise d’une ville) et les dépendants ruraux; la différence est cependant manifeste, ne serait-ce qu’en ceci que les seconds ont des revendications politiques et que les premiers n’en ont pas. On peut concevoir une cité des hilotes: Messène redevint cité au IVe siècle à partir d’une population réduite depuis trois siècles à l’état d’hilotes. On ne peut concevoir, même dans l’utopie, une cité d’esclaves. Les théoriciens grecs prennent conscience de cette différence surtout à partir du IVe siècle. Platon sait qu’«il vaut mieux ne pas avoir d’esclaves de la même patrie ni, si possible, de la même langue» (Lois , 777 d); autrement dit, l’esclave doit être de préférence un Barbare. On est ainsi ramené au cas précédent.

Hommes et femmes

Une table pythagoricienne des oppositions (Aristote, Métaphysique , A 5, 986 a, 22-64) range l’élément femelle du côté de l’illimité, du pair, du multiple, du gauche, de l’obscurité, etc., en définitive du côté sauvage, le mâle incarnant la civilisation. Cette opposition fut marquée tant que dura le civilisation de la cité. «Qui dira l’audace sans bornes de la créature humaine, les amours éhontées, toujours liées à des désastres, des femmes au cœur impudent? L’union qui joint les couples est traîtreusement vaincue par le désir sans frein qui dompte la femelle, chez l’homme comme chez la bête» (Eschyle, Choéphores , 595-601). La cité grecque, ce club d’hommes, avait conçu, entre autres opposés, un royaume exclusivement féminin, celui des Amazones. Aristote compare la domination de l’âme sur le corps à celle du maître sur l’esclave, de l’homme sur les animaux, du mâle sur la femelle (Politique , I, 1254, A, 16-19) et écrit ailleurs: «Une femme aussi peut être bonne et aussi esclave: cependant peut-être la femme est-elle un être plutôt inférieur et l’esclave un être tout à fait médiocre» (Poétique , 1454 a, 19-20). Platon ne recommandera pas l’égalité des hommes et des femmes mais l’utilisation aussi complète que possible des uns comme des autres. Cependant, tandis que la cité démocratique n’a pas conçu de cité gouvernée par des esclaves dans son cadre à elle, il existe des utopies ou mieux des fantaisies gynécocratiques. Mais les femmes au pouvoir dans les comédies d’Aristophane (Lysistrata et L’Assemblée des femmes ) ont des esclaves. La différence déjà notée à propos des esclaves entre Athènes et Sparte, la Crète et les vieilles cités agraires, cités incomplètes, est ici encore éclatante; des légendes associent pouvoir servile et pouvoir féminin (origine de Tarente, origines de Locres Épizéphyriennes); à Gortyne de Crète, on pouvait admettre le mariage d’une femme libre et d’un esclave (Code de Gortyne , Col. VI, 56 sq.; VII, 1 sq.), les jeunes filles spartiates participaient au même entraînement et aux mêmes concours que les garçons. Ailleurs, le citoyen s’est fait contre la femme, comme il s’est fait contre l’esclave et contre l’étranger.

Vieux et jeunes

Dans Les Lois de Platon, l’enfance et la jeunesse sont la part sauvage de la vie, part dont il faut bien s’accommoder en mettant la force au service de l’ensemble de la société. Les vieillards qui dirigent la cité idéale («conseil nocturne») seront donc flanqués d’éclaireurs dont on aura tempéré la violence à l’aide d’incantations. Le «principe d’ancienneté» (P. Roussel) est caractéristique du monde hellénique. À Sparte, l’autorité suprême, avec le roi et les éphores et par-delà l’assemblée, s’appelle la gérousia , conseil des anciens. À Athènes, pour être bouleute, il faut avoir quarante ans, et à l’assemblée les plus anciens ont droit les premiers à la parole, trait que l’on peut déjà relever chez Homère. Entre l’enfance et l’âge adulte, celui de la guerre et de la vie politique, se situe une période d’épreuves et d’initiations comme en connaissaient bien des sociétés «primitives». Les «cryptes» spartiates, c’est-à-dire l’élite de la jeunesse, courent la montagne l’hiver, pratiquent le vol, la ruse et l’assassinat des hilotes avant de devenir, par un renversement brutal des valeurs, des hoplites. En Crète, les «troupeaux» de jeunes s’opposent aux «compagnonnages» d’hommes faits. Dans les mythes, la chasse solitaire ou en petits groupes, la ruse sont les épreuves imposées aux jeunes. Le terrain n’est ni la ville ni sa campagne, mais la zone frontière. On a plus d’une trace de joutes de jeunes organisées ainsi par deux cités, dans les zones frontières, au voisinage des sanctuaires. À Athènes, l’éphèbe se dit aussi péripolos , celui qui tourne autour. L’éphébie est surtout connue sous la forme laïcisée d’un service militaire de deux ans, accompli principalement dans les forteresses de la frontière et réorganisé par Lycurgue après Chéronée (338 av. J.-C.). L’éphèbe porte une chlamyde noire, signe de réclusion, il ne peut aller en justice ni comme défendeur ni comme demandeur, excepté lorsqu’il s’agit de recueillir une succession, une fille épiclère (fille qui se trouve la seule héritière d’un domaine familial) ou bien un sacerdoce de famille. Aristote explique cela (Constitution d’Athènes , 42, 5) en disant qu’un jeune homme ne doit pas être dérangé pendant son service militaire. S’il s’agit de l’origine de cette coutume, l’explication est absurde, mais cette laïcisation est elle-même importante et témoigne du haut degré de rationalisation auquel étaient parvenus les Athéniens. Au sommet de la puissance, à la veille de l’expédition de Sicile (415 av. J.-C.), l’assemblée athénienne avait vu Nicias et Alcibiade s’affronter au nom des anciens et des jeunes (Thucydide, VI, 8-18). Un tel débat aurait été inconcevable ailleurs que dans la grande cité démocratique. Ici encore, l’entreprise athénienne déborde les schémas préétablis.

Les diverses activités humaines

Ville et campagne

Dans le monde décrit par Homère, l’opposition entre la civilisation et la sauvagerie n’est pas celle de la ville et de la campagne, mais celle de la campagne cultivée et de la campagne sauvage. La présence d’une polis , c’est-à-dire d’un point fortifié, d’un démos , c’est-à-dire d’un petit groupement humain dont on n’ose dire qu’il est un village, est un signe, mais moins important que celui que représente le travail des champs dont le Cyclope ignore l’existence. Chez Hésiode, la ville est, pour le paysan, un monde lointain où siègent les «rois dévoreurs de présents». Dans le monde de la cité, la campagne sauvage, l’agros , continue à exister sous forme de zones frontières peuplées de bûcherons et de bergers transhumants. On a vu que l’éphébie et la cryptie étaient associées à ces zones; dans l’agros , un dialogue existe entre Dionysos et Hermès. Hermès exprime l’action civilisatrice de la société qui fraie des chemins bornés; c’est le dieu de l’espace ouvert par rapport à l’espace clos du foyer (hestia ) symbolisé par le prytanée. Dionysos exprime au contraire le déchaînement de la nature sauvage qui peut envahir jusqu’aux terres à blé de Déméter. C’est ce que racontent Les Bacchantes d’Euripide. Idéalement, dans la cité, la distinction entre ville et campagne est supprimée, et Platon tire les conséquences de ce fait: chacun doit habiter à la fois au centre et dans la périphérie. Mais cette vérité a une signification bien différente à Sparte et à Athènes, toutes les positions intermédiaires existant par ailleurs. À Sparte, la ville, en définitive, n’existe pas: le centre monumental est à peine esquissé; la terre civique (chôra politikè ) est divisée en lots cultivés au profit des Spartiates de plein exercice, les homoioi . Le rapport n’est donc pas entre la ville et la campagne, mais entre les guerriers et les paysans dépendants – sans parler des habitants des cités de Laconie. À Athènes, au contraire, les démotes cultivent la terre avec, à l’époque classique, beaucoup plus d’esclaves qu’on ne l’a en général supposé; les dèmes ruraux sont à la fois des parties de la grande cité et des petites cités qui répètent la grande. La guerre du Péloponnèse, l’abandon de la campagne à l’ennemi, la stratégie de Périclès centrée sur la défense de la ville contribueront à ouvrir entre la ville et la campagne une crise profonde que reflète l’œuvre d’Aristophane.

Au IVe siècle se développe un nouveau genre de vie urbain (les maisons d’Olynthe en sont un témoin parmi d’autres) à mesure que la vie revêt un caractère de plus en plus privé. Paradoxalement, le développement de la flotte et du commerce maritime porte la responsabilité à la fois de l’équilibre athénien et de son déséquilibre: de l’équilibre parce que le petit peuple des campagnes intégré à la cité par Solon et Clisthène a formé une large part des équipages de la flotte et a bénéficié des revenus de l’«empire»; du déséquilibre parce que ces revenus se sont concentrés progressivement dans la ville. Aux masses déracinées par les guerres et les troubles politiques, aux mercenaires notamment, Isocrate propose comme exutoire non une nouvelle restructuration de la cité, mais la conquête coloniale de l’Asie. C’est ce qui se produira.

Paix et guerre

Au chant XVIII de L’Iliade , Héphaïstos forge sur le bouclier d’Achille l’image d’une cité pacifique et celle d’une cité guerrière: noces, festins et règlements judiciaires dans le premier cas, siège et embuscades dans l’autre; les assiégeants hésitent entre deux solutions: destruction de la ville et de ses habitants, ou partage de sa richesse? Le dilemme se posera bien souvent tout au long de l’histoire grecque. Le thème est ancien puisqu’on le trouve déjà sur l’«étendard» d’Ur au IIIe millénaire, mais la solution grecque est originale. La «réforme hoplitique», au début du VIIe siècle, fut à la fois conséquence et cause d’une profonde mutation politique. «La première constitution fut celle des guerriers et même, à l’origine, celle des cavaliers» (Aristote, Politique , IV, 1297, 6-10); participant au combat, l’hoplite impose sa participation à la vie politique. Le fait guerrier devient une donnée d’autant plus essentielle que la cité risque son existence dans la guerre. On a pu dire que, pour les Grecs, c’est l’état de guerre qui est la règle et la paix l’exception, et, de fait, jusqu’en 386 avant J.-C., tous les traités connus de nous et conclus par les Grecs entre eux sont des traités temporaires, accompagnés d’une alliance: on était allié ou on était ennemi. Des guerres grecques, on pourrait donc dire aussi bien qu’elles sont la paix continuée par un autre moyen. Institutions guerrières et institutions civiques sont étroitement parallèles.

Le terrain du combat est celui de la plaine à blé, il est choisi conventionnellement par les deux parties. Dans tous les cas, jusqu’à Épaminondas en 371 avant J.-C. (Leuctres), les troupes d’élite sont massées à droite. La bataille est le choc des deux lignes, après quoi le vainqueur, qui ne poursuit pas, élève un trophée avec les armes prises à l’ennemi. Même la lutte contre les Perses obéit pour une part à ces conventions. Dans la ligne de bataille, la solidarité des guerriers protégés par le bouclier de leurs voisins ne fait que reproduire la solidarité de la cité. La guerre du Péloponnèse porte un coup à ces pratiques, des peuples montagnards interviennent qui, par la ruse, détruisent des corps d’hoplites. À la guerre générale fait pendant le concept de «paix commune», placée d’abord sous le patronage du Grand Roi (386 av. J.-C.), puis sous la direction d’une cité hégémonique, jusqu’au jour où, à Corinthe (338 av. J.-C.), le roi de Macédoine impose son arbitrage. La cité avait, entre-temps, inventé des formes nouvelles de guerre. Une révolution comme celle d’Épaminondas, attaquant par l’aile gauche, suppose à la fois la conquête de l’espace géométrique, sans direction privilégiée, et l’influence de la guerre maritime qui s’était débarrassée très tôt de ces tabous. Les mercenaires du général athénien Iphicrate redécouvrent une guerre «noire», faite de ruses et d’embuscades, qui, à la grande époque des hoplites, était réservée aux jeunes gens. Xénophon, homme des anciennes valeurs, est aussi un technicien des nouvelles méthodes. Sommé de choisir entre la guerre technique et la guerre citoyenne, Platon renonce à la première dont il avait décrit avec lucidité les conditions au livre II de La République ; mais l’évolution se poursuit, en dehors de lui.

Art et science

La contradiction entre l’art (technè ) et la science (épistémè ) est l’une des plus profondes de la civilisation grecque. Sur le plan de ce qu’on a pu appeler (S. Moscovici) l’histoire humaine de la nature, c’est-à-dire l’histoire du monde naturel comme façonné, intégré par l’homme, elle est une civilisation de l’artisan. Quand Platon veut rendre compte, par le mythe, de la fabrication du monde, il imagine un démiurge, c’est-à-dire un artisan. L’artisan est le héros secret de l’histoire grecque. Du Céramique d’Athènes aux chantiers du Parthénon, de l’arsenal du Pirée aux chirurgiens de l’école hippocratique, à la base de toutes les créations du monde grec on retrouve l’artisan. Or l’historien de la société émet un jugement tout à fait différent. Pour lui, la catégorie de l’artisan n’existe pas. Sur les chantiers de l’Érechthéion travaillent, côte à côte, des citoyens, des métèques et des esclaves: tous sont des artisans, mais, du point de vue social, ce qui les sépare est beaucoup plus important que ce qui les unit. Héphaïstos, dieu de la fonction technique, est un dieu boiteux; l’inventeur Prométhée, le héros «aux pensées fourbes», souligne, par son ambiguïté de libérateur des hommes et d’adversaire de Zeus, les sentiments ambivalents que les Grecs éprouvaient envers des «spécialistes» qui n’entraient pas en tant que tels dans le corps social. Un chœur célèbre de l’Antigone exalte l’inventivité de l’homme, navigateur, laboureur, dompteur, chasseur, mais sommé d’insérer dans ce savoir technique les lois de la terre et la justice des dieux, faute de quoi il sera apolis , c’est-à-dire hors la cité – la cité étant elle-même le fait social par excellence, par-delà toute participation à la production. On s’explique qu’il n’y ait pas dans la langue et dans la pensée grecques de catégorie unifiée du travail. Il n’y a même pas de mot pour désigner de façon claire le travailleur. Xénophon oppose le technitès , l’artisan, le professionnel, au géôrgos , le cultivateur (Économique , VI, 6), mais le mot finira par prendre, à l’époque hellénistique, le sens de comédien, d’artiste professionnel.

Deux arts, l’agriculture et la guerre, échappaient pourtant à cette sorte d’exclusion de la vie sociale en tant que telle qui caractérise la technè . Mais, précisément pour les Grecs, jusqu’à l’aube de l’époque hellénistique, l’agriculture est un effort (ponos ), ce n’est pas à proprement parler une technè . L’agriculture n’est pas, dit Xénophon, une question de «connaissance de l’ignoré» (Économique , XX, 2), de «découverte de quelque procédé ingénieux» (Ibid ., XX, 41), mais plutôt de vertu et de soin. Le paradoxe est que le même auteur, qui était sur le plan militaire un authentique technicien, place l’activité guerrière sur le même plan que l’activité agricole, parce que l’une et l’autre lui semblent engager l’ensemble du corps social tandis que les autres sont affaire de spécialistes que la cité ne connaît pas en tant que tels. Pourtant, au IVe siècle, l’évolution de l’art militaire a des conséquences dramatiques et la cité est incapable de les maîtriser. Le débat qui oppose Platon aux sophistes est un cas particulier de ce drame de la fonction technique. Les sophistes en tant que tels ne se sont pas voulus techniciens, mais professeurs d’arétè , de vertu civique. C’est en tant qu’elle est utile au citoyen qu’ils enseignent une technique, la rhétorique. Quand Hippias d’Élis se vantait d’avoir fabriqué lui-même tout ce qu’il portait, il ne s’affirmait pas partisan d’un enseignement des techniques, mais de l’idéal de l’autosuffisance (autarkéia ). Rien de plus contraire au principe de la division du travail qui, s’il fut parfois reconnu et décrit, ne le fut jamais en tant que processus développant la production. Platon, pour disqualifier ses adversaires, les ravale au rang de techniciens, expliquant dans le Gorgias que la rhétorique des sophistes est une cuisine, non une médecine.

Les philosophes ont théorisé des oppositions de «genres de vie» qui remontent en réalité à l’âge aristocratique et aux poètes. Pour Tyrtée, à Sparte, le courage s’oppose à tout le reste. Un fragment de Pindare oppose la gloire à la richesse, à l’esprit d’entreprise symbolisé par l’aventure maritime. Quand Xénophane de Colophon, au VIe siècle, écrit à propos des vainqueurs aux concours olympiques: «Notre savoir (sophia ) vaut beaucoup plus que la vigueur des hommes et des chevaux», il s’agit du savoir politique. Quand vint la crise de la cité, et peut-être déjà chez les pythagoriciens, la vie théorique fut opposée à la vie pratique, voire à la vie de jouissance (vie apolaustique) mais personne ne créa, fût-ce pour le dévaloriser, un genre de vie «technique». Platon oppose la science (épistémè ) de celui qui contemple l’idée du lit, à l’imitation (mimèsis ) de celui qui le fabrique. Avec d’autres mots, cette opposition est consubstantielle à l’histoire de la cité.

«Nomos» et «physis»

La civilisation grecque est une civilisation de la parole et de la parole politique. La raison grecque qui distingue et met en série les couples d’opposition est une raison politique. La parole triomphe même dans l’écrit, au moins jusqu’au Ve siècle. Ce n’est guère avant le IVe siècle que triomphe le style de chancellerie, où il n’est besoin que de remplir des blancs. Une parole politique est obligatoirement antilogique: un problème politique doit se trancher, par un oui ou par un non. L’évidence avec laquelle la pensée grecque raisonne par alternatives et par couples n’a peut-être pas d’autre origine. Une œuvre comme celle de Thucydide est divisée en discours et en récits de faits; à tout moment, dans le détail d’un exposé, il use de l’antithèse entre logos (la parole) et ergon (le fait). Son œuvre montre la gnômè (la prévision raisonnable) aux prises avec la tychè (le hasard), cette Tychè qui deviendra la grande déesse des cités hellénistiques. La paix est en définitive favorable à la gnômè , la guerre à la tychè . Les mots nomos (la loi, la convention, la coutume) et physis (la nature) résument assez bien ces concepts antagonistes. Est de l’ordre du nomos ce qui est posé par les hommes. Calliclès, dans le Gorgias de Platon, invoquera la nature pour justifier la violence du tyran; pour le médecin auteur du traité du régime (I, 11), en revanche, si l’homme est capable d’imiter la nature en posant des lois , c’est parce que les dieux ont créé et ordonné une nature dont les hommes ne savent pas qu’ils l’imitent. La «nature» peut donc être à la fois source de désordre et source d’ordre (ce qu’elle est chez les «physiciens» ioniens et italiens). Par ce seul fait, la civilisation grecque dépasse continuellement les oppositions dans lesquelles on a feint de l’enfermer.

Un bon exemple au niveau des valeurs morales est celui du couple dikè-hybris , la justice (des dieux) et l’orgueil. En tant que tel, ce couple informe toute une part des Travaux et les Jours d’Hésiode, et notamment le célèbre mythe des races. Au temps de Solon et d’Anaximandre, la dikè et l’hybris sont devenues des mots du vocabulaire de la cité qui sont étendus à la structure même de l’univers. Dans la tragédie, tout héros, Antigone comme Créon, est atteint d’hybris face à l’équilibre réalisé par la cité. Chez Thucydide, cependant, ces tensions semblent disparaître. On a pu dire pourtant qu’il ne faisait que transposer dans l’histoire les valeurs de la tragédie. Son Alcibiade serait l’apatè , la tentation trompeuse offerte à l’hybris des Athéniens; cependant, Thucydide rationalise ce fait, inscrit les valeurs tragiques dans un univers positif. Ainsi procède la civilisation grecque. Son mouvement n’est pas répétition, mais invention et renouvellement. Sur le fronton de l’ancien temple d’Athéna (vers 560 av. J.-C.) à Athènes, Héraclès, le héros civilisateur, lutte avec Triton, sous le regard du monstre à trois corps. Quelque cent vingt ans plus tard, sur le Parthénon, la sauvagerie est toujours présente sur les métopes évoquant le combat des Centaures et des Lapithes, mais, sur le fronton est, le Soleil émerge et la Lune plonge selon un ordre établi, tandis que sur le fronton ouest le conflit d’Athéna et de Poséidon explose au centre d’une composition encadrée par Dionysos et le Céphise. Les thèmes sont les mêmes, mais la nature organisée domine et Dionysos est intégré dans les cérémonies que préside l’archonte-roi. Il est vrai que cela dura peu. On a pu rapprocher (R. Rémondon) ces deux anecdotes que rapporte Plutarque à propos de Périclès (Vie , 35 et 38): «En étendant son manteau entre lui et le Soleil, Périclès déchargeait une éclipse de sa signification irrationnelle, mais, malade, il gardait l’amulette que des femmes lui avaient suspendue au cou.»

Encyclopédie Universelle. 2012.

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